Les tentatives pour se protéger individuellement sont des réactions naturelles, mais vaines [lire ici]. Les béquilles ou coussins compassionnels mis en place par l’employeur peuvent aussi se révéler être des pièges : formation à la gestion du stress, consultations de psychologues prises en charge, activités récréatives au travail… Dans l’urgence, elles aident, et peut-être sauvent, des individus mais elles ne s’attaquent pas aux causes et ne permettent que de « tenir » dans une organisation du travail délétère.

Les luttes collectives pour défendre les conditions de travail et la finalité d’un service public d’éducation émancipateur sont une priorité. Comment modifier autrement les choix politiques qui conduisent aux suppressions de postes, à l’augmentation des effectifs de classe qui dénaturent le travail et ses finalités ?

Mais les attaques sur les métiers et leurs conséquences nuisent aussi aux conditions de mobilisation réussies. Les processus de l’intensification du travail qui empêche de prendre du recul, de casse des collectifs, de mise en concurrence, d’individualisation et de culpabilisation frappent les personnels. L’organisation du travail, et concrètement une partie de l’encadrement, renvoient quotidiennement les dysfonctionnements et les difficultés éprouvés par tous à la responsabilité personnelle des agents et à leurs supposés lacunes, carences ou manques. « Si vous faisiez encore plus et encore mieux, ça irait mieux» tel est le message reçu à longueur de temps. Au final, à différents degrés, une part croissante des personnels travaille épuisée, avec un sentiment de délégitimation et de culpabilité .

Pour permettre aux professionnels de faire un travail dans lequel ils reconnaissent leur métier et de consolider les conditions de mobilisations collectives, il faut combattre ces processus dans le quotidien. Diffuser la prise de conscience que les difficultés rencontrées ne sont pas personnelles. Elles sont partagées, donc collectives, et ce sont des empêchements de travailler qui attaquent la santé. Les solutions sont donc à chercher dans le collectif et dans l’activité.

Comment résister efficacement ? Sociologues, psychologues et ergonomes étudient des situations où les personnels résistent, durent et peuvent faire évoluer leur environnement. Un certain nombre de facteurs se retrouvent dans chacune de ces situations. Beaucoup relèvent de la créativité et du pouvoir d’agir. Les militants et les organisations syndicales font les mêmes constats et analyses sur des situations de travail observées ou vécues, ou lors de luttes menées. 

Parmi ces facteurs qui permettent de résister, on trouve : 

Faire vivre un collectif de professionnels

Pouvoir échanger sur les situations et les conditions de travail est un préalable. L’absence de communication approfondie entre collègues les transforme en individus confrontés à des difficultés personnelles alors qu’ils sont des professionnels confrontés à des questions de travail communes. L’heure d’information syndicale déposée par la section SNES-FSU est un des outils qui permettent de créer les conditions de ces échanges. Ces temps permettent aussi d’envisager collectivement les différentes résistances et actions possibles.

Reprendre son temps

En finir avec les réunions inutiles et improductives. Nous devons avoir notre mot à dire sur les ordres du jour, le nombre et la fréquence. Si des réunions demeurent un obstacle qui retarde votre travail, cessez d’y aller, bien peu sont obligatoires.

Refuser au maximum les nombreuses tâches annexes pour lesquelles on nous sollicite quand on pense qu’elles n’amélioreront pas le cœur de votre travail.  Ce peut être difficile de dire « non » les premières fois, surtout tout seul. Mais les gains en termes de temps pour parler et penser seront là !

Participer à une heure d’information syndicale sur le temps de travail est déjà une réappropriation de son temps. Participer à des stages du SNES-FSU pour s’informer sur ce qu’on vous cache, aussi.

Continuer de faire un travail auquel on donne un sens et dont on peut tirer satisfaction

Plus on essaie de répondre aux injonctions croissantes de plus en plus déconnectées du cœur du travail, plus la qualité du travail réalisé est menacée. Cela concerne tous les services publics (pensez aux hôpitaux et aux EPHAD).

La hiérarchie essaie d’imposer une priorité des tâches qui correspondent à ses missions et peuvent faciliter son travail même si elles éloignent leurs subordonnés de leur activité principale. Pour bien des collègues, il est naturel de répondre d’abord aux injonctions de la hiérarchie, puis d’essayer de trouver le temps pour faire leur vrai travail. Inversez les priorités. Soignez le travail qui vous tient à cœur.

On peut faire très bien son travail en ne faisant pas (ou pas tout) ce qu’on vous dit de faire.

Maîtriser les critères de qualité de votre travail

Dans la réalité, un professionnel réalise ses tâches, fait son travail, et juge de leur qualité, en fonction de plusieurs critères qui peuvent d’ailleurs évoluer en cours d’action. Les critères sont donc multiples, varient d’une tâche à une autre, mais aussi pour une même tâche en fonction des lieux, des moments et des circonstances… et peuvent évoluer en cours d’action. Le professionnel est celui qui jongle avec ces critères pendant son travail. Il est donc nécessaire de se libérer des injonctions qui limitent l’autonomie comme les « bonnes pratiques » pédagogiques valables en tout temps et en tout lieu.

Les analyses des militants du SNES-FSU peuvent alimenter une prise de distance et un esprit critique vis-à-vis de la parole institutionnelle.

Ne pas succomber à la culpabilisation.

C’est nous qui sommes face aux élèves. C’est nous qui tentons d’enseigner en dépit des bâtons dans les roues qui nous sont mis.

Pourtant trop de collègues pensent qu’ils n’arrivent pas à faire, ou n’arrivent plus à faire, ce qu’on leur demande. Ils perçoivent les problèmes professionnels créés par l’organisation du travail et les prescriptions comme des insuffisances personnelles. La hiérarchie les y aide bien d’ailleurs.

Mais c’est l’institution qui ne prend pas la mesure de ce qu’elle demande. Les chercheurs parlent de la « prescriptophrénie » (maladie de la prescription) des nouvelles formes de management !

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Le SNES-FSU propose des des outils, des analyses, des références, pour réfléchir à ses pratiques, décrypter votre quotidien professionnel. Vous trouverez sur ce site des témoignages, des travaux de chercheurs, des analyses des pratiques professionnelles etc.
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